JJ Rousseau, économie, morale et politique.

Dans le tom V de l'Encyclopedie, en novembre 1755, Rousseau consacre
un article à l'économie. Cette notice parai^tra une seconde fois à
Genève, en 1758, en édition séparée, sous le titre Discours sur
l'économie politique. Son auteur y refuse le patriarcalime économique
comme il refusera le patriarcalisme politique dans Du contract social.
L'administration du corps politique, oeuvre du gouvernement, ne doit
pas davantage e^tre conçue sur le modèle du gouvernement de la famille
que sa constitution, oeuvre de la souveraineté. Rousseau, en opposant
économie politique et économie domestique, prend ses distances par
rapport à la tradition du mercantilisme qu'il récusait déjà dans le
Discours sur les sciences et les arts, car il permettait, au nom me^me
de la prétendue splendeur de l'E'tat, qu'on admette prospérité et paix
de l'esclavage au-dehors. Lorque la philosophie reviendra, dans son
article, sur les modalités pratiques du gouvernement et
l'administration de ses biens, on ne s'étonnera pas qu'ikl traite de
la proprieté, des finances et de l'impo^t et des conditions de leur
limitation. Il se pose à leur propos la question qui le préoccupe,
également touchant l'administration des personnes, celle du bon
gouvernement. Sa réponse est sans ambages. Le gouvernement légitime a
pour bjet le bien du peuple et ses maximes sont: suivre en tout la
volonté générale et faire que toutes les volontés particulières s'y
conforment. Deux fonctions centrales le caractérisent: assurer les
biens, la vie, la liberté de chacun par la protection de tous et
former les citoyens par l'éducation publique en sachant leur inspirer
l'amour de la patrie. Ce positionnement va à contre-courent de celui
des physiocrates. Avec ces derniers, la science économique émergera
dans la seconde moitié du XVIII siècle comme catégorie autonome.
Rousseau, à leur encontre, revendiquera, dès le premier Discours, le
primat du politique sur l'économie.
Casalino Pierluigi, 26.11.2015